D’ici à 2030, plusieurs équipes acrobatiques en Europe vont devoir changer d’appareil. La majorité des appareils qui les équipent affichent parfois un demi-siècle…  Parmi l’Inventaire des industriels qui attirent l’attention il en est un qui pourrait bien être issu d’un pays que l’on attendait pas… la Corée du Sud ! 

En Belgique : un avion autrichien dès 2023 ? La composante aérienne Belge devrait retirer entre 2023 et 2026 du service ses SF-260 utilisés pour l’entraînement de base de ses pilotes. Si les modalités (achat ou location) restent à définir, l’appareil qui tiendrait la corde est le DART-550 de l’autrichien Diamond Aircraft. Or, le SF-260 est actuellement la monture de la patrouille nationale Red Devils. Cette dernière deviendra probablement la première équipe à voler sur DART-550.

La patrouille “The Red Devils” (les Diables Rouges), formation acrobatique de l’Armée de l’Air Belge vole depuis 2011 sur 4 x SF-260 M , produits depuis les années 60 par le constructeur Italien SIAI Marchetti. Cet avion, dessiné par le talentueux designer aéronautique Stelio Frati a été largement utilisé pour l’entraînement des pilotes civils et militaires. Il a été construit à près de 900 exemplaires. © Red Devils

 

L’Armée de l’Air Polonaise a fait ses adieux  au TS-11 Iskra.

Fin 2022, la Pologne a retiré du service ses mono réacteurs TS-11 Iskra datant des années 1960. les Bialo-czerwone Iskry vont donc eux aussi changer d’appareil. Pour renouveler sa flotte , Varsovie a choisi de commander 16 Leonardo M-346, mais aussi 48 Korean Aerospace Industries (KAI) F/A 50 Golden Eagle. Avec un tel nombre d’appareil et une disponibilité opérationnelle jugée supérieure à son grand frère italien, il est fort probable que la prochaine équipe polonaise évolue sur F/A-50. Comme un clin d’oeil, l’équipe sud-coréenne, les Golden Eagles, a participé au meeting d’adieu au vénérable Iskra.

Le PZL TS-11 Iskra (Etincelle) est un avion d’entraînement polonais, utilisé par l’armée de l’air et la marine polonaises. Construit à 424 exemplaires (dont 76 exportés en Inde), il est resté en service pendant pratiquement 60 ans. Il a équipé la Patrouille Polonaise depuis1969, la “Biało-Czerwone Iskry” (“Etincelles Blancs-et-rouges”).© Sylvain Gourheu

 

En Espagne : l’incertitude Airbus.

En Aout 2022, l’Ejercito del Aire a annoncé officiellement le retrait de service du Casa C101 Aviojet. L’entraînement des pilotes espagnols s’effectue désormais principalement sur Pilatus PC-21. Que va devenir la Patrulla Aguila ? Jusqu’il y a peu, le gouvernement espagnol comptait sur le projet de nouvel avion d’entraînement dévoilé par Airbus (maison-mère de Casa) en 2020, dénommé Airbus Future Jet Trainer (AFJT) et prévu à horizon 2027/28.

la « Patrouille AGUILAS (Les Aigles) de l’armée de l’air espagnole (Ejército del Aire) était équipée de sept avions CASA C-101, arrivés en fin de vie opérationnelle. Ses pilotes maîtrisent une technique de niveau mondial, entre autres le looping inversé et l’atterrissage en formation. C’est la seule patrouille acrobatique utilisant de la fumée jaune au cours de ses démonstrations en vol. © Vue d’artiste auteur Peng Chen.

Ce projet semble aujourd’hui contrarié pour deux raisons. Tout d’abord, le gouvernement espagnol a reconnu qu’il n’était pas en mesure de le financer et cherchait un appui d’autres constructeurs tels que Dassault pour le mener à bien. Mais, plus récemment, Airbus Defence and Space a conclu un accord avec KAI en vue de promouvoir la vente des appareils coréens (dont le F/A-50) en Europe. Verra-t-on un jour ces appareils aux couleurs espagnoles ? Rien n’est acté pour l’heure, mais entre un projet non abouti et un appareil disponible sur le marché et dont la maintenance pourrait être assurée sur place, la facilité ferait plutôt pencher la balance du côté de Séoul.

Et la France alors ? 

Depuis Août 2018, les Pilatus PC-21 basés à Cognac assurent la formation des pilotes de chasse avant leur transformation sur Rafale ou Mirage 2000 au sein des escadrons dédiés. D’ici 2030, les Alphajets devraient arriver en fin de vie. Pour la Patrouille de France, les options sont peu nombreuses.

Le Pilatus PC 21, pur produit de l’industrie aéronautique Helvétique qui équipe l’Ecole de Chasse de Cognac est-il pressenti pour succéder à l’Alphajet ? © Armée de l’Air et de l’Espace

L’option la plus décevante serait un passage sur Pilatus PC-21. Cette option, logique en termes de formation des pilotes et de maintenance en condition opérationnelle a deux inconvénients : l’avion n’est pas français ; c’est un turboprop à hélice et non pas un jet à réaction. Passer d’un Jet à un turboprop, d’autres équipes l’ont fait. Les Australiens sont passés du MB-326 au PC-9 et évoluent désormais sur PC-21. Les Silver Falcons Sud-Africains sont passés de l’Impala (MB-326) au PC-7 MKII. Les Israéliens sont passé du Fouga (Tzukit) au T-6 Texan II Efroni. Mais dans tous ces exemples, il s’agissait de remplacer des appareils de la génération qui a précédé l’Alphajet. Pour répondre à l’impératif de production nationale, Dassault aurait-il un projet en préparation ? Rien ne l’indique à l’heure actuelle. Pourrait-il s’associer à Airbus afin de relancer le projet AFJT alors que les deux entreprises collaborent déjà dans pour le Système de Combat Aérien du Futur SCAF ? C’est une possibilité mais là non plus aucun indice ne ressort actuellement. La France pourrait-elle alors choisir le KAI F/A-50 promu par Airbus ?

Si le choix de l’Armée de l’Air et de l’Espace pour le successeur de l’Alphajet se portait sur l’appareil Sud Coréen produit par la KAI, ce pourrait être la version T50 “Golden Eagle”, version spécialisée déjà utilisée par la patrouille acrobatique Black Eagles de la Force aérienne de la république de Corée. © KAI

Si cette solution présente un vernis européen, l’appareil ne serait toujours pas issu de la production aéronautique nationale. Cela étant, bien des équipes volent sur des avions qui ne sont pas produits sur leur territoire et utilisent des appareils qui sont dédiés à la voltige en formation. Ainsi, aux Émirats arabes unis, les MB-339 de la patrouille Al Fursan ne servent qu’à cela (et pourraient être remplacés par des M-345 ?). De même, au Canada, les CT-114 Tutor ne forment plus de pilotes depuis 2000 (NDLR voir article précédent de Guillaume Rochette) et n’ont d’autre vocation actuellement que d’équiper les Snowbirds.

Affaires à suivre…

Guillaume Rochette